En cette fin des années 1940, sous les pales des ventilateurs de l'Automobile Club du Caire, l'Egypte des pachas et des monarques flirte avec aristocrates et diplomates de tout poil, pour peu qu'ils soient européens. Régulièrement, Sa Majesté le roi honore de son éminente présence la table de poker. Extravagance, magnificence et décadence qui s'arrêtent aux portes des salons lambrissés. Dans les communs, une armada de serveurs et d'employés venus de Haute-Egypte et de Nubie s'escriment à satisfaire les exigences de l'inflexible El-Kwo, le chambellan du roi. L'esclave du monarque est aussi le chef suprême des employés de tous les palais royaux, qui régente dans ses moindres détails leur misérable existence et se délecte à professer l'art de la soumission. Parmi ses "sujets" : Abdelaziz Hamam, descendant d'une puissante famille ruinée, venu au Caire dans l'espoir d'assurer l'éducation de sa progéniture. A suivre les chemins contrastés qu'empruntent ses enfants, on découvre les derniers soubresauts de l'Egypte pré- nassérienne : morgue des classes dominantes, dénuement extrême des laissés-pour-compte, éveil du sentiment nationaliste. De toute part l'édifice se lézarde, et dans le microcosme de l'Automobile Club, où le visage noir charbon d'un domestique ajoute une touche d'élégance au décorum, frémissent les temps futurs et l'explosion révolutionnaire qui va embraser le pays. Engagé et humaniste comme jamais, Alaa El Aswany renoue ici avec les récits populaires et hauts en couleur de l'irrésistible "Immeuble Yacoubian" et désigne inlassablement la seule voie juste pour son pays : une démocratie égyptienne à construire.
Né en 1957, Alaa El Aswany est l'un des écrivains les plus célèbres du monde arabe. Son premier roman L'Immeuble Yacoubian, publié en 2006, est devenu un véritable phénomène éditorial international. Romancier, nouvelliste, essayiste, il est traduit en une trentaine de langues et a reçu une quinzaine de prix littéraires.
Chroniqueur engagé, il défend ardemment les valeurs de la démocratie dans de nombreux articles parus dans la presse égyptienne et internationale. Il est l'un des membres fondateurs du mouvement d'opposition "Kifaya" (Ça suffit).
En 2011, il a pris une part active au Printemps arabe et participé au mouvement de la place Tahrir. Cette expérience lui a inspiré son roman J'ai couru vers le Nil, publié en français l'an dernier et vendu à près de 30.000 exemplaires mais interdit, selon l'écrivain, dans tous les pays arabes sauf la Tunisie, le Maroc et le Liban. Au soir d'Alexandrie paraît en 2024.
Alaa El Aswany vit aujourd'hui aux États-Unis où il enseigne la littérature.
Né à Damas, Farouk Mardam-Bey a travaillé comme conseiller culturel à l'Institut du monde arabe. Il dirige la collection "Sindbad" chez Actes Sud. Il vit en France depuis 1965.